mercredi 28 avril 2010

TIMOUN YO ANVAN (Les enfants d’abord)

Je termine ce voyage en allant rencontrer Mme Jacqueline Lessard qui a fondé l’orphelinat L’ESPOIR à Croix des Bouquets. Nous allons participer à la construction d’un nouvel orphelinat avec des fonds provenant de différents partenaires financiers. Cette octogénaire s’occupe d’une cinquantaine d’orphelins.

Le tremblement de terre a rendu non sécuritaire l’immeuble et les enfants couchent maintenant dans des tentes. Nous devrons faire vite.

Bernard McNamara, architecte
Président d'Architectes de l'Urgence du Canada, en Haiti

samedi 24 avril 2010

TOUT PAGAY KRAZE (tout est brisé)

Jacmel:
On arrive en fin de journée à Jacmel, jolie ville de la côte sud qui a déjà eu ses heures de gloire au dix-neuvième siècle avec la culture du café. Nous visitons quelques sites d’habitations dévastées pour réaliser qu’au delà des images et reportages, il y a eu un drame humain ici. Il y a des corps sous les décombres depuis plus de 3 mois et une odeur de putréfaction insupportable s’en dégage.
Nous logeons au Cap Lamadin qui est envahi par les représentants d’agences internationales et des ONG. L’Hôtel n’a pas été affecté par le séisme bien que plusieurs immeubles avoisinants sont détruits. Où est la logique? Des constructions à qualité variable!(Cap Lamentin)

Leogane :
À Leogane nous avons rendez-vous avec le Maire adjoint qui se sent très impuissant devant toutes ces agences et ONG qui viennent dans sa ville pour intervenir comme bon leur semble et sans l’implication des autorités locales. La Mairie a des ressources très limitées, pas de services d’urbanisme ou de construction, pas de ressources, plus de directeur général car depuis le séisme la ville ne perçoit plus rien en taxes ni autres revenus. Leogane a été très touchéem; plus de 50 % des immeubles sont abimés. Trente-six mille familles vivent dans les tentes. Comment peut-on penser à la reconstruction dans ces conditions ? La reconstruction devra se faire en harmonie avec la ville existante et devra s’inscrire dans son plan d’aménagement et dans les grandes orientations pour les années à venir et cela en respectant les principes du développement durable. Malheureusement, la municipalité n’a pas les ressources pour superviser et orienter ce développement. (Mairie de Leogane)

Port-au-Prince :
Il y a du monde à Port-au-Prince. Il y a plein de vendeurs de toutes sortes en bordures des rues. Tous ces gens ne peuvent quitter leur quartier, leurs revenus en dépendent. La ville a d’abord été construite près du port pour s’étaler par la suite sur les pentes escarpées des collines avoisinantes. Une partie de la ville s’est construite de façon informelle dans des quartiers difficiles d’accès et sans services. La circulation est difficile, les boulevards et avenues ne suffisent pas à la demande. Imaginez le tremblement de terre dans cette situation où de plus les immeubles ont été réalisés sans le respect des normes de construction les plus élémentaires. Certains ont résisté, d’autres non. La qualité du béton et des agrégats de pierre calcaire (au lieu du sable) a évidemment fragilisée toutes ces structures. Maintenant on reconstruit, de la même façon. Il y aura toute une campagne de sensibilisation à faire afin que les résidents comprennent les risques qu’ils courent.

Des immeubles détruits, il y en a partout. Certains sont encore instables et risquent à tout moment de tomber dans la rue ou sur les passants. Au niveau de la reconstruction, les agences internationales et les ONG se concentrent surtout à l’extérieur de-Port-au Prince car c’est assez complexe d’intervenir ici. Ce qu’il faut c’est de travailler avec la population locale afin qu’elle participe à la reconstruction en fonction de ses priorités. Architectes de l’urgence réalisera un projet de reconstruction avec UN-HABITAT dans ces quartiers populaires.
Ce qui surprend à Port-au-Prince, c’est la présence de tous ces militaires, coréens, argentins, uruguayens, chiliens, chinois, américains, pakistanais, etc. La ville est en état de siège. Ces militaires se promènent dans la population avec leurs armes, casqués comme s’ils étaient en Afghanistan, sans compter les centaines de véhicules des Nations Unies. Si j’étais Haïtien, je me sentirais assiégé. Pas certain que j’apprécierais.

Bernard McNamara, architecte
Président d'Architectes de l'Urgence du Canada, en Haiti

mardi 20 avril 2010

Lè a rive pou nou fòme chen solidarite a pou savé PEYI DAYITI

16, 17 et 18 avril 2010

L è a rive pou nou fòme chen solidarite a pou savé Peyi DAYITI tout bon vre (pour ceux qui ne sont pas doués en phonétique : l’heure est arrivée pour que nous formions une chaine de solidarité pour sauver le pays d’HAITI pour de bon)

On quitte Camp Charly en passant près de l’aéroport. C’est congestionné évidemment, mais je m’attendais à pire. On passe près du port et du marché vers Léogane. Il y a plein d’immeuble abimés, plein de débris et des campements un peu partout. Déjà vu, rien de vraiment différent. Des campements, il y en a beaucoup et pas tous de la même qualité. Il y a des camps de fortune, ou plutôt d’infortune, des campements avec des super tentes et des petites tentes minuscules. Leogane, Grand Goâve, Petit Goâve, tristement semblables. Ces immeubles abimés n’ont jamais été conçus pour un tremblement de terre. D'ailleurs, ceux qu’ils reconstruisent ne le seront pas plus, car il n’existe à peu près pas de réglementation sur la construction si ce n’est que quelques règlements sur le lotissement. Les ingénieurs municipaux n’ont jamais été sensibilisés à ce risque et plusieurs n’avaient pas non plus l’expertise pour donner des conseils ou appliquer des codes de construction s’ils avaient existés.

Arrivés à Miragoâne, la vie reprend...les petits commerçants sur le bord des routes, les petites filles qui reviennent de l’école avec leurs boucles de couleur dans les cheveux, des vendeurs de toutes sortes, les villages plein d’animation. Et le paysage nous fait oublier rapidement le drame qui s’est passé il y a trois mois.

De Miragoâne nous traversons les montagnes pour aller rejoindre Aquin et St-Louis du Sud. De toute beauté sont ces deux baies presque inoccupées avec un vestige de fort anglais au milieu de la baie anglaise. Par la suite, petit retour vers les montagnes pour une arrivée à Les Cayes, ville importante de la région avec une plage totalement contaminée de déchets de toutes sortes et un port où l’on reçoit du ciment du Venezuela. À 300 gourdes le sac, ou 60 dollars haïtiens, ou environ 7,00 $, l’inflation postséisme n’est pas encore arrivée.

Après une visite officielle chez Monsieur Le Maire on part vers la ville d’Aristide, Port Salut à la pointe Ouest d’Haïti. Quel beau petit village de villégiature, quelques hôtels et la magnifique plage Dauphiné. Les travaux d’aménagement, des routes et du drainage ont été réalisés par Taiwan. Quoi de mieux qu’une langouste grillée pour finir la journée. Retour vers la capitale, on prend, à quelques kilomètres de Leogane, la route de l’amitié construite par la France, vers Jacmel. Pas surprenant que cette route ait été impraticable après le séisme ; elle grimpe à 1 200 mètres très rapidement. Les côtés sont escarpés et les glissements de terrain sont fréquents en temps normal. Cette route restera toujours très vulnérable aux secousses sismiques. En traversant la chaine de montagnes, on croise de petites bourgades charmantes où l’on vend des bananes et des figues. Le point culminant s’appelle le poste Bernard… eh oui !

Et on arrive à Jacmel. Nous n’irons pas plus loin de toute façon puisqu’on a plus de diesel et les stations-services non plus. Notre chauffeur devra faire la queue demain pour en trouver si on veut revenir vers Port-au-Prince.

Bernard McNamara, architecte
Président d'Architectes de l'urgence du Canada, en Haiti

jeudi 15 avril 2010

OU PAKA PA LA! (ou LE PLAISIR DANS LA SÉCURITÉ, campagne anti-sida)

13 et 14 avril 2010

Ces deux derniers jours, nous avons rencontré des maires, des représentants de services décentralisés de l’état en éducation, en santé et en finance. Pour notre mission de formulation du programme pour le FENU nous devons avoir une bonne idée, tout d’abord, comment fonctionne l’état haïtien, les communes, les départements et comment tout ce monde travaille ensemble.

(Cap Haitien) Ce matin, nous avons pris la route vers Port-au-Prince en passant par Cap-Haïtien, les montagnes de la chaine de Belance, l’Artibonite, Les Gonaïves, St-Marc et finalement Port-au-Prince où nous sommes arrivés de noirceur. Le Nord est vert avec ses plantations, mais les routes de montagnes sont épouvantables ; des trous partout. Fiez-vous sur moi, les nids de poules de Montréal ne sont rien à côté de ces trous d’autruches.

Aux Gonaïves on peut voir les dommages causés en 2008 par le débordement de la rivière Ennery qui a emporté des tronçons de route et quelques ponts sans compter l’inondation de cette ville par l’eau qui venait des montagnes, mais aussi de la boue.

Les montagnes de l’Artibonite sont beaucoup plus dénudées et avec beaucoup moins de végétation que sur le versant nord. Difficile à croire qu’il y avait même des arbres sur ces montagnes escarpées et arides.

À notre arrivée dans la région de Port-au-Prince, on s’est fait arrêtés par la Police Haïtienne sous l’œil des soldats de la MINUSTAH. Le policier haïtien, qui se prenait pour Rambo avec ses lunettes de soleil, ses gants noirs et son fusil juste bon pour aller à la chasse au canard, se prenait pour un autre et nous a fait ouvrir nos valises sur le bord de la route. Rien de grave, juste un peu déplaisant. On était seulement deux consultants sans le reste de l’équipe du PNUD.

Ce soir, nous dormons au Camp Charlie près de l’aéroport de Port-au-Prince, car demain nous partons pour la pointe du sud-ouest, un autre 4 à 5 heures de route en passant par Carrefour, Leogane. Plus d’une centaine d’humanitaires volontaires ou professionnels (IOM, UNOPS, PAM, PNUD, UNICEF et plein d’autres), hébergent dans ce camp super bien monté qui est entouré par les camps militaires du Brésil, de l’Argentine, du Chili, etc. et par des milliers de sinistrés dans des tentes à qualité variable. C’est impressionnant tout l’effort qui est mis dans ces camps et tout l’équipement et les véhicules de toutes sortes qui ont été amenés ici. Tentes, douches, cuisine, salles à manger. Les Danois ont installé ce camp au cours des premières semaines après le tremblement de terre.

Prochaine étape, Les Cayes à la pointe sud-ouest du pays.

Bernard McNamara, architecte
Président d'Architectes de l'urgence du Canada, en Haiti

lundi 12 avril 2010

YON EFOR KI DOUS (L’EFFORT DANS LA DOUCEUR)

11 et 12 avril 2010 - Nous entrons en Haïti par le Nord en passant par le poste frontalier de Dajabon. Les distances sont plus longues par la République Dominicaine mais les routes sont meilleures. Enfin, le dernier tronçon est là pour que l’on s’acclimate aux routes haïtiennes. Coté République dDominicaine c’est très vert malgré la saison sèche et pour cause le système d’irrigation qui leur permet de cultiver tout au long de l’année. Le coté haïtien c’est la poussière. C’est la MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti) qui surveille la frontière.

Le poste frontalier Dajabon/Ouanaminthe est très achalandé les jours de marché car les haïtiens viennent en grand nombre faire leurs achats de base. Le gouvernement canadien participe actuellement à la construction d’un nouveau poste frontalier.
Premier arrêt, la ville de Fort Liberté. Au dessus de l’arche d’entrée dans la ville, il est écrit L’EFFORT DANS LA DOUCEUR. Quelle belle façon de voir la vie! Toutefois malgré son emplacement fort intéressant dans une baie protégée qui a fait le bonheur des flibustiers et colonisateurs français et espagnols, la ville a peu d’activités économiques et on se croirait aux fins fonds de l’Afrique. Malgré tout, les gens semblent heureux, la plage, la mer, les fleurs et la température y sont sûrement pour quelque chose.

Bernard McNamara, architecte
Président d'Architectes de l'urgence du Canada, en Haïti

dimanche 21 mars 2010

Le printemps est arrivé ?

Journées de remplissage de formulaires et finalisation de rapports. J’apprends (par mon frère du Québec) que le printemps est arrivé; tiens, on l’avait oublié celui-là ! Faut dire qu’avec une température constante à 28-29 degrés, aucun changement d’heure, de soleil ni de saison, c’était difficile à remarquer, même s’il a plu vendredi dernier pour la première fois depuis notre arrivée. Notre hôtel afflue de bénévoles, d'ONG, de travailleurs humanitaires de toutes sortes qui se remplacent à tours de rôles. L’autre jour, c'étaient des gens de USAid puis, des travailleurs de l’environnement qui font le déblayage des rues. Hier, dix-huit Canadiens de London(ON)sont venus construire une église dans le coin. Aujourd’hui, ce sont des gens d’Unicef... bref, Yves trouve que ça bouge et il aime bien ça! On constate qu’il y a une foule de gens prêts à apporter leur petite contribution.
À bientôt!

André Bergeron, ingénieur en structure
Membre d'Architectes de l'urgence du Canada, en Haiti

vendredi 19 mars 2010

Route bloquée par un éboulement

Yves prend ça plus relax aujourd’hui... soignant son corps meurtri et buvant quelques Sprite bien chauds (ne prenant pas le risque de la glace) en remplissant les formulaires d’inspection. Moi, je repars de plus belle avec ma nouvelle liste comprenant plein d’écoles dans le voisinage. Il il y en avait une, très très haut dans la montagne, que je gardais pour la fin, sachant combien je me ferais brasser... ce qui fut le cas, pendant plus d'une heure et demi. Mais pire encore, la route était bloquée par un éboulement et il fallut continuer à pied, un bon 45 minutes sous un soleil de plomb et une chaleur insoutenable. De retour à l’hôtel, complètement vanné, épuisé, crevé, fourbu et fatigué, une bonne baignade et du vin (gracieuseté d'Yves) ont vite fait oublier cette mésaventure.

André Bergeron, ingénieur en structure
Membre d'Architectes de l'urgence du Canada, en Haïti